Entretien avec Youma Fall co-fondatrice et Directrice exécutive de PayDunya

PayDunya ( « Pay » comme paiement en anglais et « Dunya » comme monde en arabe) a été créée en 2015 par Christian Palouki (Togo), Honoré Hounwanou (Côte d’Ivoire), Aziz Yerima (Bénin) et moi-même (Sénégal). Nous avons lancé cette startup pour répondre à l’ensemble des besoins de paiement des personnes non bancarisées. Notre mission est de permettre la digitalisation des entreprises qui opèrent en Afrique grâce à des solutions digitales multicanal : émission et réception de paiements sur site internet ou application mobile ainsi que la collecte et le déboursement de paiements de masse.

  

Quels sont les services proposés ?

Au-delà des solutions de paiements digitales « basiques », nous avons aussi développé des services tels que l’envoi de factures, un service de collecte de masse pour les assurances et institutions de micro-finance, des solutions de déboursement (paiement de salaires, remboursements …). Nous avons également développé une solution pour tous les acteurs qui souhaitent vendre sur les réseaux sociaux. Sur le continent, le e-commerce se fait principalement sur les réseaux sociaux tels que Instagram ou Facebook. Nous avons aussi développé un CRM permettant aux utilisateurs de réaliser des campagnes sms pour fidéliser leurs clients ou encore des campagnes de communication.

Dans quels pays opérez-vous ?

Actuellement nous sommes présents au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Bénin. La crise du Covid-19 a beaucoup ralenti notre expansion mais le Burkina Faso et le Mali sont nos prochains objectifs d’ici la fin de l’année.

PayDunya en chiffres ?

Avec un réseau de 600 entreprises clientes, nous enregistrons en moyenne 40 000 transactions par jour mais cela varie puisque nous pouvons enregistrer des pics de 65 000 transactions par jour.

Quelles ont été les répercussions de la crise sanitaire sur vos activités ?

La crise sanitaire nous a largement impactés. Nous comptons de nombreux clients du secteur de l’hôtellerie et du tourisme qui ont eux-mêmes beaucoup souffert de la situation.

Sur le premier mois, notre chiffre d’affaires a été divisé par 3. Après ce premier mois, nous avons constaté une reprise progressive de l’activité, ce qui nous a permis de nous développer sur un nouveau segment : le service Social Shop avec la vente sur les réseaux sociaux.

 

Nombreuses sont les personnes encore réticentes aux moyens de paiements digitaux notamment à cause du manque de sécurité en ligne. Comment palliez-vous à ce problème ?

Pour rassurer les utilisateurs, nous avons choisi de miser sur la sécurité grâce à un programme, le PayDunyaSecure, mis en place sur l’ensemble de nos services. Nous avons également choisi la transparence. Car nous sommes un tiers de confiance. Pour cela, nous mettons à disposition des utilisateurs, un service après-vente pour répondre aux éventuelles réclamations. Enfin, nous sommes dans une démarche de certification PCI DSS (Payment Card Industry Data Security Standard) qui devrait aboutir en novembre 2020.

Vous avez créé PayDunya en 2015, nous sommes aujourd’hui en 2020. Quel bilan pouvez-vous faire aujourd’hui concernant le développement des solutions de paiements digitales sur le continent ?

Malgré le développement des solutions de paiements digitales, je constate encore beaucoup de freins. Le premier frein concerne la régulation puisqu’aujourd’hui, il n’existe pas encore de loi spécifique pour tout ce qui est Fintech dans la zone UEMOA. En tant que jeune startup, cela peut être vu comme une opportunité mais les agréments font aussi que les clients nous font confiance. Ce sont les agréments qui font qu’aujourd’hui nous pouvons protéger notre activité.

Le second frein concerne la formation. Jusqu’à très récemment, il n’existait pas de vraie formation fintech. Le recrutement devenait alors un véritable casse-tête.

Enfin, je pense à un obstacle de taille, commun à toutes les startups basées en Afrique. En termes d’investissement et d’accompagnement, il reste beaucoup à faire ! Quand on est une jeune startup, on a besoin de beaucoup d’argent pour se développer mais les investisseurs ne nous font pas suffisamment confiance pour nous le donner. L’écosystème francophone d’Afrique de l’Ouest est encore frileux en termes d’investissement.

 

Quelles sont vos ambitions à moyen et long termes ?

Hormis notre expansion géographique, notre réelle ambition c’est de booster la digitalisation des entreprises en Afrique. Nous souhaitons être présents sur l’ensemble du continent et permettre l’inclusion des entreprises/personnes normalement exclues du système bancaire classique, qu’elles soient formelles ou non. Si nous voulons que l’Afrique avance, il faut se lever pour pouvoir participer au changement.