Entretien avec Jamel Basiru, Directeur exécutif du Réseau des Techniciens du Cinéma en Côte d’Ivoire

Jamel Basiru, cinéaste, monteur et artistes VFX basé à Abidjan en Côte d’Ivoire. Cela fait 7 ans qu’il exerce dans le métier, sur des projets de longs-métrages et séries. Diplômé d’une école de communication audiovisuelle, il choisit de se former seul aux métiers du cinéma. Il commence par la télévision en tant que monteur. Aujourd’hui, il travaille en tant qu’assistant monteur sur le projet baptisé « Niabla », une série CANAL+ ORIGINAL portée par l’illustre Alex Ogou.  

Quelles sont les principales difficultés rencontrées dans votre métier aujourd’hui ?

La production audiovisuelle et cinématographique est aujourd’hui en plein développement en Afrique francophone subsaharienne et notamment en Côte d’Ivoire. Toutefois, on constate encore un grand manque de formation aux métiers du secteur. La plupart des producteurs locaux ne sont pas assez bien formés et connaissent peu les rouages du secteur. Les exigences ne sont pas respectées et cela se répercute sur la qualité des œuvres. Par exemple, sur un projet, il est rare que nous organisions une phase préparatoire permettant de prendre connaissance du scénario avant le montage et la post-production d’un projet alors qu’au niveau de nos métiers, nous avons besoin de connaître le scénario, d’avoir une vision globale du projet. Dans un monde idéal, il faudrait qu’il y ait du consulting en post-production. Il est important que tous les métiers qui interviennent sur le projet puissent échanger sur un projet. Aux Etats-Unis, ce type de métier existe et permet de donner une vision globale artistique d’un film ou d’une série. Il travaille étroitement avec l’ensemble des métiers y compris à la phase finale de fabrication d’un projet.

Le manque de financement est aussi un véritable enjeu. Comme cela se traduit dans votre métier ?

Le manque de financement est aussi problématique, notamment au niveau du matériel. Il existe tout un tas de nouveaux équipements modernes qui sont indispensables à la bonne réalisation de nos métiers et qui permettent d’évoluer d’un point de vue technique. En Côte d’Ivoire, les producteurs n’ont pas encore pour habitude de bloquer des budgets pour la post-production. Nous sommes tous impactés par ces problématiques de financement qui ne sont pas suffisants et qui ne nous permettent pas de concurrencer les standards internationaux. Pourtant, nous avons beaucoup de talents ici en Côte d’Ivoire, capables de réaliser de beaux projets. Il suffit de regarder la série Invisibles, réalisée et produite en Côte d’Ivoire.

Il faut bien comprendre que le manque de financement pour un projet se répercute sur l’ensemble des métiers qui interviennent sur toute la chaine de production. Cela ne se joue pas uniquement sur la production. Cela constitue un véritable enjeu si l’on veut faire rayonner nos talents et nos productions.

Vous êtes le directeur exécutif du Réseau des Techniciens du Cinéma en Côte d’Ivoire. Pouvez-vous nous présenter cette initiative ?

En réponse à toutes ces problématiques, nous avons décidé de créer une association pour promouvoir les métiers techniques du cinéma et de l’audiovisuel sur le territoire ivoirien et à l’international. Notre mission est de défendre les droits des techniciens car sur le territoire, il n’existe pas de réglementation en vigueur sur le cinéma. En 2016, un travail sur le sujet avait été initié mais à ce jour, les projets de décrets n’ont pas été mis en application. Nous militons pour obtenir un statut légal pour nos métiers. On ne bénéficie pas de droits d’intermittence, ni même de légitimité. Enfin, nous sensibilisons également aux devoirs des techniciens du cinéma car nous réclamons des droits mais nous avons aussi des devoirs pour exercer. Nous sommes donc engagés dans un processus de professionnalisation de ces métiers encore peu connus. Prochainement, nous organiserons des ateliers de formation pour sensibiliser à ces sujets. Grâce à un partenariat, nous organiserons également la venue de plusieurs techniciens expérimentés français pour venir former nos techniciens locaux.

Comment êtes-vous organisés ?

Cette association est présidée par Jean-Aristide DICO. Le conseil d’administration est composé de 13 membres et a pour objectif de tracer les lignes directrices de l’association et de fixer les objectifs prioritaires à atteindre durant son mandat. Pour l’exécution de ces objectifs, le RETECHCI est piloté par le comité Exécutif, présidé par Mr Jamel Basiru. Ce comité a pour mission de concevoir les stratégies idoines pour l’atteinte des objectifs fixés et de les mettre en œuvre.

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