Closran N’Guessan occupe depuis un peu plus de 2 ans les fonctions de Directeur de la stratégie, du marketing et de la communication du Groupe Life qui regroupe Life TV , Life Radio et Woman Up. Closran N’Guessan est un pur produit de l’école Voodoo où il a passé plus de 10 ans occupant des fonctions de Directeur de Clientèle et Planner Strategy Groupe pour 6 pays africains.
Life TV affiche, lors de la dernière vague Médiamétrie, d’excellents résultats faisant de vous au 3ème trimestre 2023 la 2ème chaine de télévision en Côte d’ivoire derrière A+ Ivoire et devant Novelas TV et les autres chaines ivoiriennes. Quels sont pour vous les raisons de cette réussite?
Les performances du dernier trimestre sont une addition de bons résultats construits depuis les débuts de la chaine. Elles ne sont pas dues à un seul programme ou à un évènement qui viendrait donner un grand coup de projecteur éphémère sur la chaîne.
Elles émanent d’un parti pris stratégique qui consiste à proposer des programmes qui vont intéresser l’ivoirien moyen.
Quand nous sommes arrivés en juin 2020, toutes les chaînes ivoiriennes préemptaient naturellement la proximité. C’est le premier attribut qui vient en tête quand on doit faire face à une pléthore de chaines internationales.
Nous, nous avons été également dans cette logique là mais nous avons décidé de ne pas déclamer cette proximité comme une simple posture de communication.
Nos bons résultats sont la résultante de ce parti-pris : faire des programmes qui intéressent vraiment l’ivoirien moyen.
Quelles sont vos émissions phares?
Dans le divertissement, Willy à Midi, affiche des audiences incomparables à 27,3 points.
Dans l’information et l’éducation, le Grand Talk, notre quotidienne de décryptage de l’information arrive en deuxième position juste après le JT national de la RTI. C’est pareil pour Y’a Problème, notre reportage hebdomadaire coup de poing.
C’est toujours dans cette quête de proximité, que nous avons décidé il y a environ un an d’entrer dans la production de fictions qui évoquent le quotidien du public.
Par exemple la série Isabelle (nominée au FESPACO et à la NISA) raconte l’histoire d’une jeune fille qui rêve de strass et de paillettes comme beaucoup de jeunes filles et garçons en Côte d’Ivoire et qui se retrouve dans une situation d’engrenage.
Nous avons également produit et diffusé l’Affaire Bomblin qui aborde le sujet de couples confrontés à la séparation et enfin Maquisards (7 nominations à la Nuit Ivoirienne du Septième – NISA) qui parle de la vie trépidante de jeunes ivoiriens dans un quartier de Yopougon qui a été un très gros succès d’audience au cours du 3ème trimestre (17 points d’audience pour les femmes).
Pour résumer, nous dirons que Life Tv, la télé sans filtre, comprend vraiment l’ivoirien moyen, son humour, ses aspirations, ses luttes et ses espoirs et se construit comme son miroir vrai et sans fard. C’est ce qui explique notre progression dans l’audimat.
Par quelles sociétés de production ces séries sont-elles produites?
Ces 3 séries ont été développées et produites par les Studios FS, société de production appartenant au groupe, en collaboration avec la TV d’Orange et sont diffusées en exclusivité sur notre chaine à 20h30 du lundi au vendredi.
Au lancement de Life TV vous aviez beaucoup investi dans les programmes de télé-réalité. Où en êtes-vous de votre réflexion sur ce genre de programme.
La télé-réalité reste l’un des éléments forts de notre identité, nous la poursuivons avec Jeune MANSA qui propose un financement de 100 millions à de Jeunes entrepreneurs Africains, en collaboration avec la MANSA BANK et bientôt la saison 2 de INSIDE, une émission de télé-réalité d’enfermement dont la saison 1 a été un franc succès.
Vous avez été les premiers à acheter les droits d’un grand évènement sportif avec l’euro 2020. Pour quelle raison n’êtes-vous pas allé sur les derniers évènements comme la Coupe du Monde 2022 ou la CAN 2023,
Nous n’avons pas poursuivi dans le domaine des droits sportifs internationaux essentiellement pour des raisons de rentabilité économique. Clairement ces évènements drainent naturellement de l’attention et de l’audience mais c’est très difficile à rentabiliser en particulier lorsque l’événement est diffusé sur plusieurs chaînes et que vous n’avez donc pas l’exclusivité.
Nous avons préféré nous concentrer sur des sports de proximité comme le Football Maracana avec le CAM Tchin Tchin ou les arts martiaux mixtes avec AML MMA League.
Vous parlez de rentabilité qui est un vrai sujet pour les chaines ivoiriennes : on observe que le marché publicitaire TV ivoirien est retombé au niveau de 2019. Comment expliquez-vous cette régression ?
Pour moi il y a deux raisons essentielles : la récession et l’émergence du digital.
D’abord, la récession, le choc après le Covid a entrainé une récession économique mondiale. De ce fait, les gros annonceurs et les multinationales ont revu leurs budgets publicitaires à la baisse. Et naturellement cela s’est répercuté sur nous.
La deuxième raison c’est qu’aujourd’hui le digital drive pratiquement tout. Même si le digital n’a évidemment pas la force de frappe de la télévision, pour les annonceurs plus petits ou moins avertis, ça coûte moins cher que d’investir dans un média comme la télévision, même si bien sûr dans les faits ce n’est absolument pas comparable en termes d’exposition et d’impact.
Aujourd’hui le digital capte une part importante des investissements publicitaires pas forcément en valeur mais certainement en volume. Il y a de ce fait même, un gros travail de pédagogie commercial à faire.
Pensez-vous que le marché va repartir à la hausse en 2024 ?
Personnellement je ne pense pas que ça puisse évoluer de façon notable.
D’autant plus que nous avons eu la CAN 2023 et que beaucoup d’annonceurs – à tort ou à raison – ont utilisé une part conséquente de leur budget pour communiquer lors de la CAN. C’était un évènement national très important mais beaucoup de parts de voix ont été noyées parmi celle des plus gros annonceurs.
Est-ce que finalement cela ne justifie pas, du point de vue des chaines, de mettre beaucoup d’argent dans un évènement ponctuel plutôt que de se concentrer sur des programmes qui cartonnent, mais dans les annonceurs, ne profitent pas ?
C’est une vraie question, mais dans les faits les annonceurs ont besoin de communiquer pratiquement tous les jours de l’année pour faire connaitre leurs offres promotionnelles structurantes ou leurs positionnements et en tant que media de masse nous devons les accompagner dans cette exigence.
Les budgets des annonceurs ne vont pas augmenter d’eux même drastiquement, c’est aux chaînes d’être plus créatives pour les convaincre.
Nous sommes dans une période charnière où il faut clairement réinventer le métier. Les chaines de télévision privées sont jeunes, nous allons trouver nos chemins et nous imposer face aux chaines internationales et/ou plus établies.
Il n’y a pas encore de consensus sur la mesure de l’audience. Quel est votre point de vue sur le sujet ?
Médiamétrie, l’agence émettrice de cette audience, est l’un des leaders mondiaux du secteur et est une référence auprès de nombreuses multinationales présentes dans notre pays. En Côte d’Ivoire, ses mesures d’audience se sont affinées au fil du temps sur deux points : une taille plus grande de l’échantillonnage et un plus grand nombre de localités.
Ceci dit, il reste important que la mesure d’audience soit consensuelle. Il y a une initiative de du Ministère de la communication pour créer un cadre d’échanges, mais malheureusement ça ne va pas assez vite.
Les mesures d’audience sont vitales pour tous parce qu’elles apportent de la rationalité, elles valident nos stratégies et font connaitre nos performances surtout en tant que chaines locales jeunes. Elles donnent une boussole fiable à tous les annonceurs et au Grand public.
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