Entretien avec Simon Mbelek, Responsable communication et relations publiques chez JUMIA Cameroun

Pouvez-vous nous présenter les activités de Jumia en Afrique ?

JUMIA c’est la principale plateforme de e-commerce en Afrique. Lorsque nous nous sommes lancés dans cette aventure il y a 7 ans, nous avons observé le monde et avons remarqué que le commerce électronique avait déjà des bases en Europe, aux Etats Unis, en Amérique Latine et en Chine. Nous voulions donc reproduire le modèle sur un territoire plein d’opportunités et nous avons choisi l’Afrique, un continent avec 1.3 milliards de personnes. Nous nous sommes alors fixé comme objectif d’offrir aux africains, un accès à des services et produits de marques, partout où ils se trouveraient. Nous voulions surtout relever un défi majeur dans un continent où le système de distribution traditionnel était très limité. La technologie a rendu cela possible et nous permet surtout de rendre la distribution plus efficiente.

Nous avons donc mis en place une Marketplace qui permet de connecter de milliers de vendeurs dans le continent aux millions de consommateurs que nous recrutons tous les jours grâce aux dépenses marketing que nous faisons. Nous proposons aussi des services comme la livraison de repas, le paiement des factures et la recharge de cartes de crédit, la réservation de chambres d’hôtels, des offres d’emploi, etc.

Comment êtes-vous organisés ? Dans quels autres pays êtes-vous présents ? Quelles sont vos problématiques ?

Nous sommes présents dans 14 pays africains notamment au Cameroun, Nigéria, Kenya, Maroc, Sénégal, Tunisie; Algérie,  Côte d’Ivoire, Uganda, Rwanda, Egypte, Tanzanie, Ghana et Afrique du Sud.  Nous sommes focalisés sur ces 14 pays et couvrons 700 millions d’habitants, dont plus de 400 millions d’internautes.

Même si les problématiques sont nombreuses, elles ne sont pas les mêmes d’un pays à un autre. Nous avons des problématiques de taux de pénétration internet dans les pays de l’Afrique centrale par exemple, nous faisons face au problème d’adressage dans la majorité des pays où nous opérons, nous avons des difficultés au niveau des infrastructures comme la mauvaise qualité des routes ; le transport est un autre défi auquel nous faisons face au quotidien, sans compter les mentalités car nombreux sont ceux qui ne se sont pas encore appropriés ce nouveau système de distribution. Mais à chacun de ces défis, nous travaillons pour apporter notre contribution. Nous livrons par exemple partout au Cameroun malgré le problème de route et d’adressage.

Que représente Jumia aujourd’hui sur le continent ?

L’Afrique compte 1.3 milliards d’habitants et grâce à la percée de la technologie, nous avons plus de 470 millions d’utilisateurs internet aujourd’hui. Si vous résidez en Afrique, vous allez remarquer qu’il y a un nombre limité de supermarchés ou de grandes surfaces de distribution, ceci à cause d’un manque d’infrastructures. Conséquence, les consommateurs ont un choix et un accès limité aux produits et services de qualité.

Avant 2012 et la création de Jumia, il n’y avait pas d’e-commerce en Afrique. Notre présence est un énorme atout pour les utilisateurs, les vendeurs qui disposent à travers Jumia d’une visibilité en ligne et d’un accès à des millions de consommateurs et pour ces derniers d’avoir accès à un large choix de produits à des prix compétitifs. Nous proposons des services comme la livraison de repas grâce à notre plateforme Jumia Food, le paiement des factures et la recharge de cartes de crédit avec Jumia  PAY, la réservation de chambres d’hôtels par Jumia Travel, etc. Mais nous proposons surtout un large choix de produits sur notre Marketplace: du mobile à l’électronique en passant par le cosmétique et le vestimentaire. Tous les produits de première nécessité mais également de bureau, de maison, etc.

Comment vous différenciez-vous de la concurrence ?

Le commerce électronique est secteur nouveau dans le continent et tout le monde à sa place. La présence de plusieurs acteurs est un avantage pour les vendeurs locaux qui multiplient des opportunités de vente, mais également pour les clients qui ont un choix plus large.

Notre mission reste d’aider la population à mieux vivre au quotidien et à économiser du temps et de l’argent. Aujourd’hui Plus de 4,8 millions de consommateurs utilisent notre plateforme quotidiennement. Nous aidons également nos vendeurs à faire croître leurs entreprises grâce à notre plateforme, comme en témoigne le fait que nous avons favorisé la croissance économique de 80 000 vendeurs sur le continent. L’e-commerce en Afrique ne pèse que 1% du total des ventes pendant qu’en Chine on parle de 20%. Nous sommes conscients des défis mais notre détermination est sans faille.

Nous avons construit notre plateforme avec une profonde expertise locale, nous avons acquis de nombreuses années d’activité exclusivement en Afrique et tiré parti de tous nos enseignements sur chaque marché pour créer un avantage concurrentiel très fort sur l’exécution de nos projets.

Bien que nous soyons très fiers de Jumia aujourd’hui, nous sommes toujours très ambitieux quant à notre avenir, nous voulons aider plus de consommateurs à économiser du temps et de l’argent, à accéder aux services financiers, à aider plus de vendeurs, à aider plus de partenaires logistiques à croître et à profiter de cette opportunité, et à offrir au monde entier, l’opportunité de voir le développement du continent africain à travers notre histoire.

 

Le développement d’internet sur le continent doit faire face à de nombreux enjeux. Quel regard portez-vous là-dessus notamment concernant le prix élevé de la data ?

Un des enjeux du développement de l’économie numérique et surtout du commerce électronique en Afrique, c’est l’évolution du taux de pénétration internet. Cela ne sera possible que si les offres sont bénéfiques et les prix accessibles à la majorité. Il est important de se pencher sur cette question primordiale si nous voulons rattraper les grands pays.

Comment voyez-vous l’avenir du e-commerce en Afrique francophone ?

 Le commerce électronique est un secteur tout nouveau en Afrique. Il faut être très patient et investir sur l’avenir si l’on ambitionne de s’y lancer. Certaines régions ont déjà réussi à tirer leurs épingles du jeu et c’est une très bonne chose.

L’Afrique francophone accuse un petit retard pour plusieurs raisons : le taux de pénétration internet qui reste faible, le coût élevé de la data, le coût des smartphones qui malgré les efforts d’acteurs comme JUMIA, reste encore élevé, la mauvaise qualité des infrastructures, les routes qui ne sont pas très développées ou encore l’épineux problème de l’adressage.  Mais au regard des chiffres publiés cette année par la Conférence des Nations Unies pour le Développement (CNUCED), l’Afrique francophone est bien représentée dans le top 10 de la région. Trois pays y figurent malgré les difficultés énoncées plus haut.

Mais la croissance et la stabilité de ce secteur passent par une conjugaison d’actions fortes:

  • Sensibiliser les entrepreneurs locaux et même les grandes enseignes sur l’apport de ce secteur dans la croissance de leurs entreprises
  • Sensibiliser les jeunes sur le rôle majeur de ce secteur d’activité
  • Intégrer le commerce dans les programmes de formation
  • Investir dans le développement des infrastructures
  • Proposer des législations fortes, etc

De grands acteurs investissent dans le développement d’internet notamment les GAFA. Qu’en pensez-vous ?

Comme mentionné plus haut, le développement du commerce électronique passe par une croissance du taux de pénétration internet;  toute initiative dans ce sens, sera donc une opportunité pour nous mais également pour le continent.